L’EUROLEAGUE AU FORMAT NBA, UNE AVANCÉE POSITIVE POUR LE BASKETBALL EUROPÉEN ?

Le système de ligue fermée ou en partie fermée va voir le jour dès l’année prochaine sur le continent européen. C’est une première dans l’histoire du sport européen. En effet, l’Euroleague masculine de basket-ball va voir son format évoluer.

Avant de voir quelles vont être les composantes de ce nouveau format et de se questionner sur le sujet, nous allons dans un premier temps tenter d’expliquer très clairement en quoi consiste une ligue fermée.

Les meilleurs exemples pour illustrer ce format de compétition est assurément le sport US, où l’ensemble des ligues comme la NBA, la NFL, la NHL ou encore la MLB ou la MLS sont des ligues fermées. Ce terme signifie qu’il n’y a pas de système de promotion/relégation entre plusieurs divisions comme cela peut être le cas dans l’ensemble des championnats sportifs européens (Exemple en France: Ligue 1 et Ligue 2 en France pour le football).

 

Dans une ligue fermée, les clubs sont des entreprises franchisées. Chaque propriétaire de club paie un droit d’entrée pour participer au championnat. On parle donc de franchises dans ces ligues et non de clubs. Le Commissaire de la ligue (Directeur Général) fixe le montant de la franchise après une étude du marché potentiel de la ville devant l’accueillir. Un propriétaire de club peut déplacer sa franchise d’une ville à une autre, si le marché de la première n’est plus aussi rentable que le marché de la seconde. (Exemple : la franchise des Seattle Sonics en NBA s’est déplacée à Oklahoma City en 2008).

 

Dans une ligue fermée, les salaires sont encadrés par la ligue. Tous les 5 ans des conventions collectives sont signées entre la ligue et les joueurs, représentés par un délégué. Ces conventions mentionnent la fixation d’un salary cap autrement dit la masse salariale que chaque franchise est autorisée à dépenser pour payer ses joueurs annuellement. Les franchises sont autorisées à dépasser ce salary cap mais pour chaque dollar dépensé au dessus de cette limite, elles doivent reverser un dollar à la ligue. Les franchises dépassant cette limite sont celles dont les propriétaires sont les plus riches.

 

Depuis toujours, les ligues européennes « rechignent » à utiliser ce système mais pourtant, il y a maintenant quelques semaines, l’ULEB (Union des Ligues Européennes de Basket-ball) organisation qui régie la « Turkish Airlines Euroleague » (Coupe d’Europe) qui est la compétition européenne reine, a annoncé la création d’une ligue européenne en partie fermée.  Cette nouvelle ligue serait basée sur le business pur et la richesse des clubs. A la manière de la NBA, celle-ci compte donner naissance à des «franchises», s’appuyant sur les notions de marque, de propriété et de management. Sur seize participants, il y aurait onze permanents. Concernant les places restantes, une irait au vainqueur de l’Eurocoupe (C2), elle aussi remodelée, et qui se jouerait à 24 suivant le format actuel de l’euroleague. Trois autres aux vainqueurs de Championnats nationaux  (les noms de ces championnats n’ont pas encore été dévoilés) et une dernière au vainqueur d’un tour préliminaire. Contrairement au format actuel avec ses quatre poules de six, chaque équipe rencontrerait donc toutes les autres à deux reprises (30 journées). Les phases finales et le Final Four viendrait clôturer la saison comme dans le format actuel. L’arrivée d’une telle ligue en Europe et de son fonctionnement amène à se questionner sur plusieurs points.

 

Le premier est l’attachement des supporters à leurs clubs. La notion de franchise introduit le fait que ces franchises peuvent changer de ville si les propriétaires estiment que cette dernière n’est plus assez attractive en termes de business. Autre élément, une franchise est une marque. C’est à cette marque que les supporters sont attachés, à ses joueurs, ses couleurs, au spectacle proposé (match, animations) lorsqu’ils viennent au match. Pour résumer, on peut considérer qu’ils sont attachés aux « services et produits » proposés par cette marque. L’attachement d’un supporter européen à son club va au-delà de ces considérations. Il est également attaché à la ville et à ce qu’elle représente L’exemple des « ultras » est le plus significatif. Peu importe le niveau de services proposés au stade ou la qualité du spectacle sportif offert par leur équipe, ils sont toujours derrière elle. La question qui peut alors se poser est la suivante : est-ce que les supporters européens seraient prêts à suivre et supporter leur club/franchise alors qu’elle a changé de ville ? Rien n’est moins sûr. Et c’est là que réside la différence culturelle entre le sport européen et le sport américain. La notion d’attachement à la ville et au club de la ville est beaucoup plus forte en Europe qu’aux Etats-Unis.

 

Autre point, la mobilité géographique des franchises. Aux États-Unis lorsqu’une franchise déménage, c’est pour des raisons financières. Pour déménager, elles attendent des villes un tissu démographique important pour attirer un maximum de chaland mais aussi une concurrence relativement faible pour exploiter au mieux le marché et être les plus attractives possible. Aux Etats-Unis, les franchises qui changent de villes ne rencontrent pas de difficultés sur ce point la, car le nombre de ville comportant un gros bassin de population est très important. On imagine mal en Europe, une franchise déménager et s’installer dans une autre grande ville, car dans un premier temps la concurrence peut être forte tant dans la même discipline que dans d’autres sports (exemples : Londres, Madrid, Paris). Dans un second temps, le nombre de bassins de population importants en Europe sont moins nombreux qu’aux Etats-Unis. Cela laisse donc peu d’opportunité de mobilité pour les franchises. Le modèle de franchise au sens américain du terme n’aurait alors que peu d’avenir en Europe si on prend en compte ces arguments.

 

Dernier point, l’avènement du sport-spectacle en Europe. J’entends par là, « finit la peur du résultat et donc de la défaite » étant donné qu’il n’y a plus de risque de relégation. Cette situation n’est pas forcément optimale car elle peut donner parfois lieu à des matchs « sans saveur » comme c’est le cas en NBA. Certaines équipes pratiquent ce que l’on appelle le « tanking », stratégie qui consiste à perdre le maximum de matchs en fin de saison lorsque l’équipe n’est plus en course pour les phases finales. L’objectif : récupérer le meilleur joueur lors de la « draft ». C’est la loterie de fin de saison qui permet aux clubs de récupérer les meilleurs joueurs universitaires du moment. Le fait d’avoir le plus mauvais ratio de victoires/défaites sur la saison donne plus de chances à ces franchises de pouvoir signer le meilleur joueur. Dans le cadre de l’euroleague (format ligue fermée), il ne serait pas encore question d’un système de « draft ». Mais dans le cas où le format américain serait copié, c’est un élément qu’il ne faut pas négliger.

 

La création de cette ligue pose également une autre question, celle de l’appartenance des clubs à leurs championnats actuels. Les clubs (ou futures franchises) devront-elles quitter leurs championnats pour jouer dans cette nouvelle compétition ? Cela reste à vérifier. Quid des revenus annuels générés par les clubs/franchises ayant quittés leurs championnats pour évoluer dans cette ligue ? Ils joueront moins de matchs, entre 15 et 25 à domicile dans l’année selon les équipes, donc je pense que la question des revenus des clubs/franchises a le mérite d’être posée.

 

Les onze "franchises" assurées de leur place dans la future Euroleague :

Efes Istanbul (TUR), Fenerbahçe Istanbul (TUR), Real Madrid (ESP), FC Barcelone (ESP), Vitoria (ESP), CSKA Moscou (RUS), Milan (ITA), Maccabi Tel-Aviv (ISR), Olympiakos (GRE), Panathinaïkos (GRE), Zalgiris Kaunas (LIT).

 

@Mathieu_Algret

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